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Bretagne : autopsie d’un mythe mouillé

  • aurorejacquet
  • 23 avr.
  • 3 min de lecture




J’ai mis le doigt sur le secret le mieux gardé de France. Un secret sulfureux, transmis de génération en génération. Un secret météorologique.

Je sais qu’en le dévoilant je prends de gros risques. Ma région de cœur va m’en vouloir mais je me dois d’être honnête envers le reste de la France. Ma soif de vérité m’y oblige.

Ce que je vais révéler peut changer vos plans pour cet été. Cela peut ébranler le paysage touristique des dix années à venir. J’espère que vos billets d’avion sont remboursables.

 

En Bretagne, il ne pleut pas tout le temps.

 

La première image qui nous vient lorsqu’on évoque la Bretagne, c’est une personne bravant le vent et la pluie en ciré jaune et bottes assorties. C’est un leurre. Une image créée de toutes pièces. Une légende.

Un pacte générationnel oblige les Bretons à porter un ciré pour entretenir le mythe. Ils se reconnaissent entre eux. Un coup d’œil furtif, un sourire léger accompagné d’un hochement de tête entendu. Ils se félicitent en silence. Ils se congratulent dans un mutisme régional.

Des touristes, attendris par cet accoutrement folklorique, les prennent en photo devant une mer agitée. Pour le cliché, les Bretons adoptent tous ce même air mélancolique face à la mer. Ils rentrent ensuite chez eux et ôtent leur déguisement. A l'abri des regards, enduits de crème solaire, ils s’allongent en maillot de bain sur un transat au soleil, satisfaits.

 

Ma belle-famille est dans le coup. La veille de notre départ pour un séjour en Bretagne, les parents de mon mari (un Breton qui porte des cirés, donc) s’excusaient du mauvais temps. Pour autant, ils nous envoyaient des photos de leur jardin ensoleillé accompagnées d’une prière - dont seuls les Bretons en ont le secret - « profitons-en avant que la pluie ne revienne ».

Durant tout notre séjour, nous nous sommes réveillés avec un grand soleil. C’était merveilleux et agréable. Mon mari, bien qu’exilé à Bordeaux depuis des années mais n’ayant pas oublié d’où il venait, ouvrait les volets et adoptait un air étonné. Par effet de mimétisme enseigné depuis sa tendre enfance, il psalmodiait un énième « profitons-en avant que la pluie ne revienne ».

 

Durant ce même séjour, nous parlions de la pluie et (un peu) du beau temps avec la coiffeuse. Cette dernière s’excusait du mauvais temps. Gargarisée par mon nouveau statut de lanceuse d'alerte, je me permis de la contredire lui rappelant les derniers beaux jours que nous avions eu. Je décelais alors la peur d’être repérée dans ses yeux. Ce cas de figure n’était jamais arrivé. On ne lui avait pas appris à réagir en conséquence. Elle bégaya et en regardant dehors insista sur le temps pluvieux. Téméraire, je lui tenais tête, j’affirmais un soleil radieux à venir. Je bluffais. Ils prévoyaient en effet de la pluie pendant dix jours. Elle se liquéfia sous mes yeux et fit mine de devoir aller chercher un autre fer à lisser. Autre fer bien chaud qu’elle prévoyait certainement d’utiliser pour me cramer le crâne si je continuais mes raisonnements conspirationnistes.

 

Je soupçonne un complot d’envergure.

 

Leurs aïeux bretons ont pactisé avec Météo France. Cette institution s’engagerait à déclarer de la pluie en permanence et les locaux tiendraient le même discours régional quant à la pluie incessante. Les touristes n’y verront que du feu. Les plus curieux d’entre eux, viendront voir par eux-mêmes et les autochtones, faussement surpris face à ce grand soleil, loueront leur présence « vous nous avez ramené le soleil ».

 

Je ne veux pas me vanter mais j’ai mis le doigt sur l’affaire du siècle. Les Bretons ont donc savamment orchestré une réputation de région pluvieuse afin de ne pas être dérangés.

Bretons, Bretonnes, je m’excuse par avance, mais il fallait offrir la possibilité à toute personne en mal de beauté de découvrir votre beau pays et de venir s’y dorer la pilule.

 
 
 

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